Prendre le large - 2de partie : les auteurs de violences conjugales



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Jeudi 29 avril 2021

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Prendre le large

Seconde partie : les auteurs de violences

Comment comprendre les mécanismes de la violence ?

Les mécanismes de la violence sont complexes et font intervenir différents types de facteurs :

  1. facteurs culturels et sociologiques : l’intégration des stéréotypes féminins tels que l’oubli de soi, la responsabilité des besoins affectifs du conjoint et des enfants, la douceur et la passivité, la censure de la colère, la faible estime de soi.
  2. facteurs socio-démographiques : le jeune âge de la femme et l’union libre, la dépendance affective et économique, l’isolement social.
  3. facteurs neurobiologiques, psychopathologiques et environnementaux :
    • au plan neurobiologique :
      • le cerveau limbique est le lieu de la gestion et de la régulation des émotions (amygdale, hippocampe et hypothalamus). C’est là qu’est reçue l’émotion vécue comme une menace et que se déclenche la réaction violente. Le cortex préfrontal qui permet la prise de décisions adaptées va inhiber, contrôler cette réaction. Les traumatismes et le stress durable altèrent ces parties du cerveau et peuvent favoriser la survenue de dysrégulations émotionnelles et de comportements violents.
      • certains neurotransmetteurs diminuent les comportements violents (sérotonine) tandis que d’autres les augmentent (dopamine, noradrénaline) ainsi que les androgènes.
      • consommation d’alcool et autres toxiques.
    • au plan psychopathologique : dans un environnement sain et adapté, l’être humain acquiert une capacité de contrôle suffisante pour s’adapter au monde environnant. Si cet environnement est défaillant ou pathogène, la personnalité se construit de manière fragile et avec le risque de survenue de comportements violents.


Head Study (Geometric).

Rabindranath Tagore


Les auteurs de violences ont souvent des antécédents de traumatismes dans l’enfance. Ils souffrent rarement de troubles mentaux avérés mais ils présentent souvent des traits de personnalité avec une incapacité de gérer les tensions et les conflits, favorisant les comportements violents :

  • beaucoup d’entre eux sont immatures, avec une anxiété de fond infiltrée par le doute et le manque de confiance en soi. Ils sont inquiets, intolérants à la frustration et réagissent par la pression et la violence sur autrui,
  • l’égocentrisme est souvent au cœur des comportements violents : soit dans une tonalité paranoïaque (susceptibilité, méfiance, psychorigidité, tendance à l’interprétation, vécu de persécution) soit dans une tonalité perverse (absence de prise en compte d’autrui, cynisme, cruauté),
  • l’impulsivité avec irritabilité, explosivité,
  • l’aspect cyclothymique avec alternance de hauts et de bas sans que l’intensité atteigne le niveau des troubles de l’humeur.

La relation d’emprise est un fonctionnement pathologique de la relation : le sujet égocentrique est tenté d’établir une relation de domination à l’égard de l’autre. Il est dans son propre monde et dans l’incapacité d’empathie avec autrui.

Certaines situations sont particulièrement à risque :

  • la grossesse est un facteur déclenchant ou aggravant les violences conjugales : 40 % des femmes battues rapportent avoir subi des violences « domestiques » pendant leur grossesse. Certains hommes jaloux de la capacité de gestation des femmes sont pris de violences destructrices, non seulement du ventre procréateur mais aussi du produit de leur propre fécondation qui leur apparaît comme leur ayant été volé.
  • l’annonce d’une séparation qui représente une menace insupportable et qui résonne avec un lien d’attachement insecure ou la peur d’être abandonné.


Deux figures.

Rabindranath Tagore


Une prise charge des auteurs est-elle possible ?

Cinq points sont à étudier :

  • la reconnaissance des faits : le sujet peut reconnaître totalement les faits qui lui sont reprochés, ou partiellement (elle exagère). Il existe aussi la reconnaissance indirecte (si elle l’a dit, c’est que c’est vrai). Il peut aussi nier sans agressivité, ou de façon agressive (elle veut me détruire) ou avec défi,
  • le rapport à sa responsabilité : certains en sont conscients (c’est ma faute, je n’ai pas pu me contrôler, j’ai un problème), d’autres partiellement (c’est vrai c’est ma faute mais pourquoi les femmes nous piquent là où ça fait mal), d’autres pas du tout (elle me provoque),
  • le vécu émotionnel du passage à l’acte : le sujet peut évoquer un sentiment de regret et de culpabilité authentique, parfois même du remords. D’autres fois, il existe juste un sentiment de malaise (ce n’est pas beau). Et parfois, le sujet est froid et impassible,
  • la capacité ou non de comprendre le retentissement pour la victime : certains sont conscients et comprennent que leur compagne puisse rompre la relation, d’autres ramènent toujours la chose à eux-mêmes (je l’aime et elle aussi, elle va regretter d’avoir fait ça), d’autres n’ont aucune préoccupation de ce qui se passe pour la victime et vont même être dénigrants,
  • le rapport à la loi : certains reconnaissent et acceptent la pertinence de la loi, d’autres y sont hostiles.

Comment soigner ?

La plupart du temps, le soin est pénalement ordonné par le Juge d’Application des Peines.

Certaines réalités sont authentiquement mal maîtrisées par le sujet violent : la jalousie, la peur de perdre, la difficulté à gérer le conflit etc. Il existe un manque de confiance en lui-même et dans l’autre. Le sujet dit « à tonalité perverse » peut cacher une fragilité due à des blessures secrètes.

Si le sujet est ouvert à l’idée d’un suivi et qu’il s’engage dans un processus thérapeutique du fait d’une prise de conscience, il sera orienté vers une psychothérapie classique.

S’il semble plutôt imperméable à tout suivi, il sera orienté vers une prise en charge groupale où son ressenti pourra évoluer, à l’écoute des autres sujets comme « en miroir ». Dans un second temps, ces sujets peuvent évoluer vers un engagement individuel aux soins et une autocritique.

Les soins de psychothérapie peuvent être associés à un traitement médicamenteux.

La thérapie de couple n’est proposée à moyen terme, que si trois conditions sont réunies : la reconnaissance des faits, la conscience de l’impact sur la victime et la sensibilité au regard des enfants.

Comment prévenir ?

Il faut briser la chaine de transmission de la violence :soutenir la parole des femmes victimes, encourager les soins psychiques et les stages de citoyenneté pour les auteurs, écouter l’enfant témoin de la violence, pour permettre au plus tôt la prise en charge des vécus émotionnels douloureux.

Un enfant qui peut parler est un enfant qui souffre moins, qui ne fixera pas dans son imaginaire un mode relationnel violent, qui sera moins susceptible d'être lui-même violent.

Informer, éduquer et porter l’espoir pour l’avenir

« Mais le processus réel de remplacement de la peur par l'espoir incombe à chaque individu dans sa société. Et lorsque les individus commencent à exprimer leur propre sentiment d'espoir et à agir en fonction d'une perspective commune, ils commencent à découvrir une cause commune qu'ils peuvent soutenir. Ils parlent et ressentent les mêmes problèmes et opportunités. Et ils peuvent devenir une énorme source de force et de réconfort les uns pour les autres.
J'espère que cela vous arrivera. »

Mawlana Hazar Imam à l’Université de L’Aiglon en Suisse,
en 2014, à l’occasion de la remise des diplômes

 

Dispositifs d'urgence :

Fiche pdf regroupant les numéros de téléphone et les sites Internet en France, Belgique, Suisse et Côte d'Ivoire : Cliquez ici.

Si vous ou une personne de votre entourage se trouve en situation de souffrance psychique, n'hésitez pas à faire appel à un professionnel de santé mentale pour une aide appropriée.

Vous pouvez également nous contacter à [email protected].


Crossing the Waters

Second part: the perpetrators of violence

How to understand the mechanisms of violence?

The mechanisms of violence are complex and involve different types of factors:

  1. Cultural and sociological factors: the integration of female stereotypes such as self-forgetfulness, responsibility for the emotional needs of spouse and children, softness and passivity, censorship of anger, low self-esteem.
  2. Socio-demographic factors: young age of the woman and common-law status, emotional and economic dependence, social isolation.
  3. Neurobiological, psychopathological and environmental factors:
    • at the neurobiological level:
      • the limbic brain is where emotions are managed and regulated (amygdala, hippocampus, hypothalamus). This is where the emotion experienced as a threat is received and the violent reaction is triggered. The prefrontal cortex, which facilitates adaptative decision making, will inhibit and control this reaction. Trauma and long-term stress alter these parts of the brain and can lead to emotional dysregulation and violent behaviour.
      • some neurotransmitters decrease violent behaviour (serotonin) while others increase it (dopamine, noradrenaline) as well as androgens.
      • alcohol and other drugs use
    • at the psycho-pathological level: in a healthy and balanced environment, the human being acquires sufficient control capacity to adapt to the surrounding world. If this environment is faulty or pathogenic, the personality is built in a fragile manner and with the risk of violent behaviour.

Perpetrators of violence often have a history of childhood trauma. They rarely suffer from a proven mental disorder but often display personality traits with an inability to deal with tension and conflict, which encourages violent behaviour.

  • many of them are immature, with background anxiety infiltrated by self-doubt and lack of confidence. They are anxious, intolerant of frustration and react with pressure and violence on others.
  • Egocentrism is often at the heart of violent behaviour: either in a paranoid tone (susceptibility, distrust, psychorigidity, tendency to interpret, experience of persecution) or in a perverse tone (lack of consideration for others, cynicism, cruelty).
  • Impulsiveness with irritability, explosiveness.
  • the cyclothymic aspect with alternating highs and lows without reaching the intensity the level of mood disorders.

The hold relationship is a pathological functioning of the Relationship: the egocentric subject is tempted to establish a Relationship of domination towards the other. He is in his own world and unable to empathise with others.

Certain situations are particularly at risk:

  • pregnancy is a factor that triggers or aggravates domestic violence: 40% of battered women report having experienced domestic violence during their pregnancy. Some men, jealous of women’s capacity to bear children, are taken to destructive violence not only of the procreative womb but also of the product of their own fertilisation, which they see as having been stolen from them.
  • the annoucement of a separation that represents an unbearable threat and resonates with an insecure attachment bond or the fear of being abandoned.


Homme barbu.

Rabindranath Tagore


Is it possible to support the perpetrators?

Five points are to be studied:

  • aknowledgement of the facts: the person may fully acknowledge the facts of which he is accused or partially acknowledge them (she exaggerates). There is also indirect recognition (if she said it, it must be true).They may also deny without aggression or aggressively (she wants to destroy me!) or defiantly.
  • the relationship to one’s responsability: some are aware of it (it’s my fault, I couldn’t control myself, I have a problem), others partially (it’s true, it’s may fault but why women poke us where it hurts?) and others not at all (she provokes me!)
  • the emotional experience of the act: the person may evoke a feeling of genuine regret and guilt, sometimes even remorse. At other times, there is just a feeling of unease (it’s not nice). And sometimes the person is cold, impassive.
  • the ability or not to understand the impact on the victim: some are aware and understand that their partner may break off the relationship, others always bring it back to themselves (I love her and so does she, she is going to regret having done this), others have no concern for what is happening to the victim and will even be denigrating.
  • the relationship with the law: some recognise and accept the relevance of the law, others are hostile to it.

How to treat?

Most of the time, care is ordered by the enforcement judge.

Some realities are genuinely poorly controlled by the violent person: jealousy, fear of loss, difficulty in dealing with conflict etc. There is a lack of confidence in oneself and in others. The person said to have "a perverse tone" may hide a fragility due to secret wounds.

If the person is open to follow-up and engages in a therapeutic process as a result of awareness, he will be referred to classical psychotherapy.

If he seems rather resistant to any follow-up, he will be directed towards group treatment where his feelings can evolve, by listening to the other persons, as if they were a "mirror image". In a second phase, these persons may evolve towards an individual commitment to care and self-criticism.

Psychotherapy can be combined with medication.

Couple therapy is only proposed in the medium term if three conditions are met: recognition of the facts, awareness of the impact on the victim and sensitivity to the children’s view.

How to prevent?

The chain of transmission of violence must be broken:encouraging victims to speak out, helping perpetrators for mental health care and for citizenship internship, listening to the child who has witnessed the violence so that painful emotional experiences can be dealt with as soon as possible.

A child who can speak is a child who suffers less, who will not fix a violent relationship in his or her imagination, who will be less likely to be violent himself.

Inform, educate, bring hope for the future.

"But the actual process of replacing fear with hope rests with every individual in his or her society. And once individuals begin to express their own sense of hope and to act on a common outlook then they begin to discover a common cause that they can support. They speak and sense the same issues and opportunities. And they can be come an enormous source of growing strength and reassurance for one another.
I hope that that will happen to you."

Mawlana Hazar Imam, at the Aiglon College in Switzerland
in 2014, during the graduation ceremony

 

Des étudiants de l’UCA (Université d'Asie Centrale) développent une application pour lutter contre la violence domestique dans le cadre d’un hackathon
L’application permettra aux femmes d’échanger entre elles sur les situations qu’elles traversent, d’accéder à des services d’aide et de contacter individuellement une ligne téléphonique d’urgence active 24 heures sur 24. Lire sur akdn.org

 

Hackathon leads UCA (University of Central Asia) students to develop app to combat domestic violence
The app will allow women to share stories about issues they are facing, receive counselling services, as well as gain access to a 24-hour crisis hotline for individual consultation. Read on akdn.org

 

Emergency services:

PDF file including telephone numbers and websites in France, Belgium, Switzerland and Ivory Coast: Please click here (in French).

If you or one of your relatives suffer from mental health issue, do not hesitate to get help from a mental health professional.

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